18 avril 2011

La machine médiatique a décidé de flinguer Royal


Le système médiatique est un monstre qui fabrique des icônes pour mieux les brûler sur la place publique.

Tel est le sort que les médias français semblent vouloir réserver à Ségolène Royal. L’acharnement dont font preuve les journalistes aujourd’hui pour saboter sa candidature aux primaires est curieusement proportionnelle à l’enthousiasme avec lequel ils l’avaient autrefois propulsée au sommet.

Les médias ne sont plus aujourd'hui un simple contre-pouvoir. Ils sont le quatrième pouvoir, peut-être le plus puissant. Ils jouent le rôle de chef d’orchestre, donnent le tempo de la vie politique et mettent en musique l’opinion, à coup de reportages bien choisis, d’articles assassins et de sondages orientés. Il serait malvenu cependant, dans le cas de Ségolène Royal, de cracher dans la soupe. Ce système, elle a su l’utiliser au moment le plus opportun. Il l'a portée au sommet de sa popularité en 2006.

Certains continuent pourtant de penser que les médias travaillent pour la droite. Je crois personnellement qu’il n’en est rien. Je crois que les médias, dans leur grande boboïtude parisienne, travaillent dans leur vaste majorité pour la gauche. Ils ont fait de Ségolène Royal leur star, leur idole, leur égérie à un moment où ils pensaient qu’elle représenterait la meilleure chance des progressistes en 2007. Les divisions du camp socialiste et la machine parfaitement huilée du camp sarkozyste ont malheureusement conduit la France sur un tout autre chemin, celui d’un pays qui a sombré dans les divisions sous la présidence extrêmement mal menée d’un Sarkozy décidément mal inspiré.

Mais pourquoi ce désamour des médias aujourd’hui avec Ségolène Royal ? La réponse est à mon avis cruelle. Je crois, c’est ma triste conviction, que tout est mis en œuvre pour la voir échouer parce que le système médiatique veut la victoire de la gauche en 2012. Et ce système médiatique a tout simplement décidé qu’il ne souhaitait pas prendre le risque d’une deuxième « aventure Royal ».

Alors, pour lui barrer la route, rien ne lui est épargné dans les médias. Pour commencer, des sondages totalement surréalistes sortent chaque semaine pour façonner le choix des électeurs. Après avoir martelé pendant des mois que Dominique Strauss-Kahn était le seul à pouvoir battre Nicolas Sarkozy en 2012, la côte sondagière du héros du FMI s’est évidemment envolée. Depuis quelques semaines, les médias s’amusent désormais à tester une variante qui consiste à dire que François Hollande est en fait tout aussi crédible que DSK. Aujourd’hui, les sondages les donnent au coude à coude. Est-ce l’opinion des Français qui fait les sondages ou bien les sondages qui font l’opinion des Français ? La ficelle est devenue tellement grosse aujourd’hui qu’elle en est ridicule.

S’il n’y avait que les sondages. Mais le système peut parfois devenir injuste, quand il n’est pas tout simplement mesquin. A ce titre, le Grand Journal de Canal Plus semble avoir pris la tête de la croisade anti-ségo à la télévision. Pas une émission ne se déroule sans que les chroniqueurs ne demandent à leurs invités si Ségolène Royal ferait une bonne présidente de la république. Une de ces petites questions rhétoriques qu’ils aiment balancer le sourire au coin, la condescendance en bandoulière.

Dans la presse et à la télévision, les analystes politiques se succèdent pour débattre du possible retrait de la candidate dans la course des primaires, possibilité jamais évoquée par la principale intéressée. Hier encore, les caméras du JT de France 2 suivaient Royal lors d’un déplacement (sans la presse normalement) sur un marché de sa région. Et la voix off d’expliquer que plus personne ne s’intéresse à elle, la preuve étant offerte aux yeux des téléspectateurs à travers la comparaison des images de ce déplacement discret avec celles de son arrivée à la dernière Université d’Eté de la Rochelle. Une malhonnêteté intellectuelle sans nom quand on sait qu’elle est à ce jour la seule à gauche capable de remplir des salles de militants venus en bus de toute la France pour la voir et l'écouter.

C’est là que l’histoire est savoureuse. Les médias, dans leur puissance complaisante et méprisante, sous-estiment aujourd’hui la montée du cinquième pouvoir, celui de l’opinion. Ce pouvoir est aujourd’hui porté par les réseaux sociaux qui fonctionnent comme des poches de résistance qui se tissent et s’organisent sur le net pour devenir le seul véritable contre-pouvoir aux médias classiques. En effet, ce pouvoir n’est à la botte de personne. Il se moque des puissances de l’argent. Il s’indigne quand le pouvoir en place est injuste. Il s’offusque quand les médias pratiquent la manipulation. Il se révolte quand certaines situations deviennent insupportables. Rien ne lui échappe. Il fait même tomber les dictatures. La prochaine course à l’Elysée ne se fera certainement pas sans lui. Ségolène Royal l’a bien compris. Elle est d’ailleurs la personnalité politique la plus favorablement tweetée du moment, dixit Métro et TF1. Loin des sondages que l’on achète.

Au moment où je rédige ce billet, la question n’est en fait même pas de savoir si Ségolène Royal est la mieux placée pour renverser Nicolas Sarkozy en 2012. La question est de savoir si les médias ont le droit de choisir pour 65 millions de Français qui sera leur prochain président de la république. Elle est également de savoir si le mensonge et la manipulation sont acceptables pour arriver à cette fin.

La justice et la liberté sont en tout cas deux grands principes que je ne cesserai jamais de vouloir défendre. Je pense que les médias doivent être justes dans leur traitement de l’information et les citoyens libres dans leur choix démocratique.

La machine médiatique a décidé de flinguer Ségolène Royal ? Eh bien je veux croire que le cinquième pouvoir, celui de l’opinion, va donner une leçon à la machine infernale. Henry de Montherlant a dit « On reconnaît l’homme libre à ce qu’il est attaqué simultanément ou successivement par les partis opposés ». Mon vote en octobre me placera,  je pense, du côté de l’indépendance et de la liberté.

15 commentaires:

  1. Il serait bon de dire une bonne fois pour toute que LIBERATION et le Nouvel Obs ne sont plus depuis longtemps des journaux dits de gauche. Souvenez vous de S.JULY faisant la leçon aux electeurs du NON ern 2005, quant au Nouvel Obs, il est depuis des décennies l'organe de la deuxième gauche aujourd'hui ouvertement sarkozyste.
    Alors à la place de Ségolène, je dirai "mon Dieu, gardez moi de mes amis, mes ennemis je m'en charge".
    Celà dit, je suis d'accord avec vous, le 5ème pouvoir est déjà là et n'est pas bobo.
    Cordialement
    Serge PASTOR
    http://da-esterel.over-blog.fr/

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  2. Très bon billet cher Matthieu ! Ségolène Royal est la plus dangereuse pour Sarkozy qui avait dit lui-même pendant la campagne de 2007 qu'elle avait tout pour le battre ! Le PS donna, alors , un coup de pouce à Sarkozy !

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  3. Bonne analyse. Les mouches changent d'âne quand elles ont se sont suffisamment nourries sur lui. Et comme les médias sont en perte d'influence par rapport à internet et aux réseaux sociaux, ils ont choisi le lynchage pour faire du chiffre.

    Vive donc le 5ème POUVOIR !

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  4. "Je crois, c’est ma triste conviction, que tout est mis en œuvre pour la voir échouer parce que le système médiatique veut la victoire de la gauche en 2012. Et ce système médiatique a tout simplement décidé qu’il ne souhaitait pas prendre le risque d’une deuxième « aventure Royal ». "

    Ben voyons, le système médiatique ou la médiacratie de ce pays contrôlée et détenus par le cercle du Fouquet's, veut la victoire de celui qui défendra le mieux ses intérêts, si le candidat de la gauche est DSK ça fera l'affaire, Hollande à la rigueur, Aubry ça reste gérable (elle est bien encadrée cf. Le Siècle; Minc etc) Mais Royal ??? Surtout pas, bien trop indépendante, et incorruptible surtout!

    Si les mêmes l'ont soutenue avant les primaires en 2006, c'est qu'ils étaient pour la plupart convaincus (une femme: inédit dans ce pays pour un parti majoritaire; peu de réseaux au sein de son parti; l'animosité des Jospiniens à son égard etc)qu'elle perdrait! Leur candidat était Sarkozy, relisez la presse de l'époque et particulièrement après les primaires, alors que chacun relayait en boucle les pseudos bourdes de Royal, offrait de larges tribunes au travail de sape des strauss kahniens, Fabiusiens etc (rappelons nous : les Gracques; spartakus) sans parler de la bienveillance vis à vis de Bayrou, la plupart (à commencer par libé) se montrait bien plus timoré pour dézinguer Sarkozy (à part marianne ? marianne qui soutenait bayrou). Bref, ce qui a changé aujourd'hui, c'est que Royal est la seule adversaire réellement redoutée par cette oligarchie médiatico financière, parce que cette fois si elle est désignée: Elle gagnera!

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  5. "Ils ont fait de Ségolène Royal leur star, leur idole, leur égérie à un moment où ils pensaient qu’elle représenterait la meilleure chance des progressistes en 2007."
    Les Médias ont rendu compte des propositions nouvelles et des débats participatifs de Ségolène Royal jusqu'en novembre 2006; mais une fois sa candidature officialisée,c'est là que l'acharnement contre elle a commencé: les buzz médiatiques sur les gaffes de Ségolène Royal,"la bravitude",l'amplification excessive de la moindre de ses propositions qui ne leur convenait pas, la déformation de la vérité, Sarkozy le meilleur en tout pour la France, c'était quand même en 2006-2007; son incompétence,c'est quand même l’œuvre de Libération et du Nouvel Observateur. les Médias de gauche, ces médias des lobbies, n'ont jamais voulu de Ségolène Royal, tous soutenaient DSK, ensuite ils ont soutenu Sarkozy. Ils parlaient de Ségolène Royal uniquement pour ridiculiser et railler ses propositions; c'est donc une vision très partiale et personnelle que de dire que les Médias l'avaient portée au sommet: elle rapportait, elle faisait vendre, parce qu'elle était populaire par ses propositions novatrices et son travail de terrain, pas parce que les médias sont allés la chercher à Melle pour la propulser au sommet.
    Ce que font les Médias maintenant c'est ignorer et taire ce qu'elle fait pour l'effacer de la scène politique; ils savent que leurs railleries et leurs moqueries ne marchent plus, alors, ils changent de stratégies.
    Il ne faut pas négliger le fait que les éditorialistes de tous les grands médias parisiens sont membres du Club Le Siècle; ils sont convaincus que seul un des leurs peut et doit diriger la France; ils ont choisi Sarkozy en 2007 et ils choisissent DSK en 2012.
    Mais nous militants choisissons Ségolène Royal et ce ne sont pas les médias qui vont nous imposer leur choix.

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  6. "Au moment où je rédige ce billet, la question n’est en fait même pas de savoir si Ségolène Royal est la mieux placée pour renverser Nicolas Sarkozy en 2012. La question est de savoir si les médias ont le droit de choisir pour 65 millions de Français qui sera leur prochain président de la république. Elle est également de savoir si le mensonge et la manipulation sont acceptables pour arriver à cette fin."

    Excellentes remarques.

    Les Médias n'informent plus, ils manipulent. Si on veut trouver une information, il vaut mieux se rendre sur le Net. Les réseaux sociaux supplantent de plus en plus le pouvoir nocif des médias; mais combien de français vont chercher l'information sur internet?

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  7. "Ben voyons, le système médiatique ou la médiacratie de ce pays contrôlée et détenus par le cercle du Fouquet's, veut la victoire de celui qui défendra le mieux ses intérêts, si le candidat de la gauche est DSK ça fera l'affaire, Hollande à la rigueur, Aubry ça reste gérable (elle est bien encadrée cf. Le Siècle; Minc etc) Mais Royal ??? Surtout pas, bien trop indépendante, et incorruptible surtout!"

    Je partage cet avis, mais comme le dit Mat G, faisons confiance au 5è pouvoir et décuplons sa puissance!
    Cordialement à tous!

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  8. Votre article me plait, mais il y deux choses qui doivent être dites : rappelez-vous de ce que disait récemment Szafran chez Ruquier :"Ségolène Royal est un produit du peuple contre les médias, et les médias l'ont haïs, y compris ceux de gauche".*
    De plus, je pense que les médias travaillent essentiellement pour ceux à qui ils appartiennent, c-à-d qu'il y a collusion entre eux et le pouvoir économique.
    Aujourd'hui, la situation est très clair : les milieux économiques veulent DSK, comme ils voulaient Sarko en 2006, et leur acharnement sur Royal montre bien qu'ils la redoutent, qu'ils ont peur qu'elle puisse mettre en application ce qu'elle propose.

    *http://www.dailymotion.com/video/xhkk88_sondeur-vs-zemmour-naulleau-2-pol-onpc-120311-ruquier_news

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  9. Article super intéressant même si peu exagéré je trouve car pour avoir vraiment apprécié la prestation de Ségolène sur Itélé, je crois que c'est elle qui est encore maitresse du jeu, c'est elle qui refuse les plateaux télé, les interviews etc. Elle le dit très bien, elle a tiré des leçons de 2007 et a fait son choix pour l'instant de rester dans l'ombre d'aller à la rencontre des Français, et je trouve ça très intéressant, elle nous prend encore par surprise, et c'est comme ça que je l'apprécie !!!

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  10. Beau plaidoyer en faveur de S.R. . Après les années Jospin, menées non par lui mais sous le principat de celui qui se trouve aujourd’hui au F.M.I (ersatz de socialisme pour nanties) ; après la pantalonnade d’un certain 21 avril, beaucoup de gens n’en avaient plus rien à faire du monstre politique. A commencer par moi. Un cadeau du ciel nous a été livré en la personne de Mme Royal. Je ne pensais plus retrouver quelqu’un qui défende encore les intérêts du peuple, tant ce parti est devenu repaire de malandrins. Pour un parti de gauche, cela devrait être une lapalissade. Une tête bien faite dans un corps sain, honnêteté, rigueur, ténacité … : n’est pas ce que demande le peuple ?

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  11. C'est marrant je pense exactement comme toi, surtout le point sur les médias qui ne sont pas de droite mais qu'ils ont simplement peur que Royal les amène encore à l'échec.

    Petit bémol sur twitter, où y a eu un appel à s'y inscrire...

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  12. @Matyeult,

    Et quand ces mêmes médias tapaient sur elle en 2006 et tout au long de la campagne électorale?
    Les journaux prétendument de Gauche n'ont jamais soutenu Ségolène Royal: elle n'est pas membre de Le Siècle!
    Utiliser quelqu'un,diffuser et de former ce qu'il dit pour le ou la tourner en dérision comme le faisaient Libé et le Nouvel Obs, ce n'est pas soutenir.

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  13. @Elly : L'article est bon mais dire que les médias sont ou étaient à l'unanimité pour le candidat de gauche est une vue de l'esprit . Les journaux de droites sont affiliés . Les journaux de gauches , ceux qui ont une large audience , n'éxistent plus car devenu centristes mous . Pas étonnant que D.SK. et F.H. aient la cote . En 2007 , Royal leurs a été imposé par la base . Ils ont du s'y plier . Qu'après elle en est jouée , c'est de bonne guerre .

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  14. Merci à tous pour vos nombreux commentaires. Je regrette de ne pas avoir cité l'exemple du Siècle dans cet article parce que je suis en effet tout à fait d'accord pour dire qu'il existe un petit groupe économico-politico-élitiste parisien, mêlant politiques, journalistes et économistes. Et ils n'ont clairement pas envie que Ségolène Royal, qui n'est pas issue de leurs rangs, accède au pouvoir. Trop d'intérêts en jeu ?

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  15. "Trop d'intérêts en jeu ? "

    Oui! Il suffit de voir à qui ils appartiennent.
    Il y a aussi le fait d'appartenir aux mêmes lobbies et aux mêmes cercles qui crée des liens et des complicités.

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